Le gâteau au yaourt (et ses petits secrets)
Ne sous-estimez jamais un gâteau au yaourt ! Sous un air sage, une tendance à la modestie et des petits complexes (oui il en a, à force de voir dans les magazines ces belles Pavlova colorées et parfaites…) il renferme des trésors.
Il a été l’un de vos premiers succès en cuisine. Il vous a vu grandir. Il vous a fait friand(e) de fait maison, et un peu plus sociable aussi…
Oui, c’était lui votre premier « gâteau de groupe » en maternelle, cette pâte où vous avez fièrement versé la touche finale (le pot d’huile) sous les regards attentifs et le souffle suspendu de vos petits camarades. Avec la même bouteille jaune que celle de la télé, avait précisé votre voisine de table. Wahou… (Elle avait un peu de mal avec les gommettes, mais question télé, elle s’y connaissait.)
Malgré ce grand honneur, votre humeur était toute chiffonnée… car c’était votre rivale Sophie, avec son pull du club Barbie, qui avait été choisie pour verser les deux pots de sucre. Et oui ! Ou bien parce que vous auriez préféré touiller ? Sûrement… surtout en découvrant l’adresse peu rassurante dont faisait preuve le petit Jerôme armé d’une cuillère en bois. Mais bon, la maîtresse en avait décidé ainsi (grande prêtresse que vous admiriez) alors c’était comme ça. Rien ne sert de pleurer sur le lait renversé… et mieux valait un maladroit qu’un Franck* au nez qui coulait ! Vous aviez échappé au pire !
Dans l’attente de la cuisson, il y avait l’odeur de la craie mouillée, il y avait des activités vous laissant d’une humeur plus rêveuse que surexcitée, malgré la perspective d’y goûter… la pancarte des voyelles qui vous intriguait, qui se cambrait doucement sous l’effet du vent lorsque la porte s’ouvrait… Les pas de la directrice dans le couloir (et un peu les reniflements de Franck aussi), des serre-tête capricieux et leurs glissades, une histoire de rouge-gorge à illustrer en pâte à modeler (vous n’étiez pas des rigolos), des envies de pipi retenues, plus ou moins, jusqu’à la récré, des collants qui plissaient, des mains un peu collantes sur de merveilleux livres et la promesse de tant de découvertes…
*Je jure que ces petits héros sont presque fictifs !
Peut contenir des traces possibles de bonheur
Ce gâteau au yaourt, dans votre petit univers gustatif c’était l’alpha et l’oméga. Il était aussi bien l’ordinaire, celui qui semblait avoir toujours été là, que le signe joyeux d’une fête d’anniversaire (avec des pommes dedans). Il avait l’art d’annoncer les belles journées, les ballons et bonbons, et les courses-poursuites en chaussettes ! Avec son copain le quatre quarts, ou le marbré, il plaisait à tout le monde. Il s’entendait aussi avec la barre de chocolat… Il avait le pouvoir des choses sûres.
Il était ce gâteau dont je parlais ici… celui d’une grand-mère, qui devait bien cacher sa tendresse quelque part. Celui des petits-déjeuners de vacances, de l’insouciance, des fenêtres ouvertes et des yeux collés, des pots de confiture de myrtilles et des images du cacao Poulain à collectionner. Avec en prime parfois un petit bouton de moustique à gratter.
Il était là. Pas compliqué mais complice.
Il était aussi ces moments dans la cuisine avec votre maman… qui sans trop de soupirs face à la farine envolée, faisait mine de ne pas regarder du tout si vous suiviez bien les consignes et qui vous laissait faire… vous, petite tête penchée sur les dessins de « La pâtisserie est un jeu d’enfant ». Elle levait ainsi le voile d’un grand mystère : l’allégresse de grandir dans la confiance… et la confiance en soi. C’était la meilleure part, mais vous ne le saviez pas.
Les gâteaux au yaourt (et une maman bienveillante) font grandir les enfants !
Oui, c’est cela son plus grand secret. Il vous a un peu appris à compter (un véritable pédagogue Montessori) et il vous a donné cette satisfaction de pouvoir dire « c’est moi qui l’ai fait » avant même de savoir lire, convertir et peser. Contrairement à la pâte à crêpe, il ne vous a jamais fait le coup des grumeaux, lui, et ne nécessitait aucune assistance !
Aux oubliettes, votre titre de « Queen de la dinette en papier mâché » ! Pendant quelques instants vous vous sentiez pleine d’assurance, d’égal à égal avec ces adultes si doués et donneurs de leçons toujours bons conseillers. Ces super héros qui travaillaient sans tablier, sans avoir l’air de se concentrer, sans rien renverser, et qui pouvaient s’approcher du four. Vous aviez entrevu un monde où vous pouviez tout accomplir !
Champion de métamorphose
Un gâteau au yaourt, c’est si simple, si doux… et à faire, c’est bête comme chou ! Je me suis dit qu’il était temps d’en retrouver le goût, même sans gluten, même sans yaourt au sens courant… qu’il était temps de ne plus perdre un grain de cette tendresse égarée, ni de cette leçon de foi, en soi. (Non, chez nous la révolution thermomix n’a toujours pas eu lieu)
Ma recette est celle de tout le monde… et elle n’est à personne vraiment ! Elle est un peu un socle commun. Je la propose ici en plusieurs versions, quelques exemples d’infinies métamorphoses… Car c’est un autre tour de force magie du gâteau au yaourt : même s’il est bon nature, et qu’il est un peu oldschool, il est ouvert à tous vos délires ! Il grandit avec vous et avec vos envies. Il vous ressemble. Il se décline à volonté… Et c’est si confortable d’innover, lorsqu’une recette de base est bien rodée ! Il m’arrive même – pardon pour les puristes – de le faire sous forme de petites madeleines. (Non, mesdames et messieurs les pâtissiers, il n’y a plus de respect !)
Alors, dites-moi, allez-vous préférer la déclinaison Cake aux framboises et belles pépites de chocolat ? Une version aux graines pavot moulues ? Ou bien le Muffin sur son petit lit de cerises ? (Il suffit de dénoyauter et couper en deux quelques fruits, et de les déposer dans la pâte, dans le fond du moule)
Ou peut-être la recette qui chez nous a toujours un grand succès : les Petits moelleux citron-framboises ? (Pour celle-ci, utilisez un yaourt Sojasun au citron et n’ayez pas peur de rajouter encore un filet de jus de citron, puis déposez au centre 1 ou 2 grosses framboises surgelées)
Ce gâteau saura reprendre du service en compagnie de vos enfants, neveux, petits enfants… ou ceux à venir ! Mais, de temps en temps, si vous décidiez plutôt de les prendre rien que pour vous, ces 30 petites minutes de cuisson ? Et même un peu plus, le temps qu’il refroidisse…
Tandis que le four travaille, et que le fouet trempe un peu dans l’évier, soyez donc laxiste ! Je vais vous avouer que pour moi cela fait partie du charme de la pâtisserie. Il y a bien-sûr de temps en temps un gâteau du mercredi avec mon enfant (pas toujours le mercredi)… Mais assez souvent, c’est le soir tard, que je me mets à préparer un cake ou un granola pour le petit déjeuner ou le goûter du lendemain et c’est un peu le moyen de la mettre à profit, cette attente !
Quand le gâteau est encore tiède, je me sens obligée d’en couper une tranche pour vérifier la texture… voir s’il est assez moelleux… et là, toute seule, bien tranquille dans mes chaussons, sans un petit Franck qui se mouche sur sa manche, j’en profite pour lire, ou écrire un peu… et continuer de grandir.
Pour une recette complète du bonheur, je vous laisse apercevoir quelques magazines créatifs, inspirants, qui font du bien (que moi j’aime) et qui s’accorderont parfaitement avec un moment calme pour savourer votre part ! Je dis ça, je dis rien… Soyez curieux ! Furetez ! Pianotez dans Google… Feuilletez-les chez votre marchand de journaux ! (Et si vraiment vous aimez les conseils plus concrets, n’hésitez pas à me questionner)
Belle fin d’été à vous tous et dites-moi si ce gâteau (ou même le sweat Barbie) vous évoque aussi quelques souvenirs… La recette est juste un peu plus bas, et la photo des gâteaux citron-framboises aussi. J’embrasse, les Franck, Jerôme ou Sophie qui passeraient par là ! 🙂
La recette de base :
Gâteau au yaourt (de brebis ou végétal)
- Mélangez 1 yaourt de brebis, soja ou coco d’environ 100 g. qui servira de pot de mesure, avec 3 beaux oeufs fermiers (65 g./oeuf et s’ils sont vraiment petits j’en mets 4) et 2 pots de sucre non raffiné. Remuez bien au fouet, pour dissoudre ce dernier.
- Ajoutez 3 pots de farine de riz ou 2 pot de farine de riz et un pot de poudre d’amande.
- Remuez à nouveau, juste pour bien incorporer la farine. Ajouter 1 sachet de levure (environ 8 g.) et 1 cuillère à café de gomme de guar ou de psyllium, 1 pincée de vanille en poudre, 1 filet de jus de citron puis 1 demi pot d’huile ou rempli au deux tiers si vous l’aimez encore plus moelleux… ça fonctionne aussi très bien avec l’huile de coco.
Versez dans un moule à cake.
Faites cuire 30 mn à 180° chaleur tournante. (Pour la version « muffins » la cuisson est à surveiller à partir de 15 mn, selon votre four.)
ASTUCES :
- En tout début de cuisson, après 6-7 minutes, fendez le gâteau dans sa longueur (jusqu’à mi-profondeur) à l’aide d’un couteau. C’est ce qui lui permettra de mieux gonfler, en développant un sillon doré.
- De la qualité de vos ingrédients, et surtout celle de vos oeufs vont vraiment dépendre le goût et la couleur ! (Vive les poules qui picorent les pissenlits dans les prairies !) Choisissez aussi une huile bio qui supporte bien la montée en température ! Tournesol, colza ou coco etc…
NB : La jolie feuille de capucine est comestible, figurez-vous ! A Chartres notre producteur bio Aux petits légumes en vend sur le marché, aux beaux jours, le mercredi soir & samedi matin. C’est délicieux (et original) pour présenter des fruits ou des biscuits, accompagner une assiette de crudités ou bien pour enrouler une petite tranche de coppa à l’apéro ! C’est un peu sucré et piquant à la fois…
Merci à eux pour cette découverte !
Quel plaisir. Mais tu manies l’écriture avec volupté. C’est si bien conté. J’adore. Je déguste tes mots comme je dégusterai ton gâteau au yaourt. Vivement ta prochaine recette pour mon plus grand plaisir des yeux et des papilles. Belle journée. Bises
Un très grand merci, Marie pour ces gentillesses…
car je me disais que mon « introduction » était peut-être un peu trop longue pour partager une si simple recette !
Bises et au plaisir d’échanger.
je l’attendais…..merci
Cela fait plaisir !
A bientôt !
Quel talent de conteuse. Je n’ai encore pas fait le choix entre savourer la poésie culinaire ou déguster la cuisine poétique !
Ha ha ! Bien fière si mon article peut toucher un peu au moins à l’une de ces deux catégories !
Bisous
Coucou Claire !
Aujourd’hui c’est le deuxième article provenant de ta plume que je lis !!
Je te remercie pour ces moments agréables et surtout cet article qui m’a permise de retourner à l’école maternelle, avec les serres tête et les sweat-shirt de Barbie ou Mickey, sans oublier le copain de classe enrhumé qui ne de devait sûrement pas avoir son mouchoir illustré avec les petits schtroumpfs
Et la recette fièrement rapportée à la maison, où maman malgré ses grandes capacités de cuisinière consacre un moment de pâtisserie avec bienveillance pour réaliser ce gâteau, avec application… et cette fierté de partager pour le goûter.
Merci à toi Claire et à bientôt
Merci ! Ce sont en bonne partie ces petits mots et ces partages qui me donnent envie de faire vivre ce blog !
Je suis heureuse de t’avoir embarquée dans ma petite machine à remonter le temps. Ah le mouchoir schtroumpfs oublié (ou perdu à la récré ?) j’aurais du en parler… 🙂
A très vite !
Tes mots sont aussi doux que cette recette, qui a assurément le goût de l’enfance.
Je me souviens très bien de mon premier gâteau au yaourt, qui a été aussi, comme des milliers d’enfants je pense, mon premier gâteau tout court. C’était chez ma meilleure amie de l’époque – nous devions être en CE2 -, que j’ai tâté pour la première fois du fouet et du pot-de-yaourt-à-tout-faire.
Confiance de Grands Enfants encore petits, avec la grande sœur (quand même !) comme garante de la cuisson au four.
Merci pour cet article, Claire, tu m’as donné envie de me replonger dans ce classique. Ta version chocolat-framboise a l’air très gourmande ! *_*
Cela me fait chaud au coeur, Marine ! J’ai découvert ton blog il y a très peu de temps… et il a tellement d’âme !
Je vous imagine, trois filles en grande mission dans la cuisine… et j’imagine aussi le beau choco-framboises qui va te replonger définitivement dans tous ces souvenirs.
Merci Claire pour cette magnifique recette si bien contée !
Je l’ai donc testée dans les minutes qui ont suivi la publication de ton article, avec un très joli cake que tout le monde a adoré… Mais j’ai recommencé peu de temps après, car tu m’as donné envie d’essayer la recette aux framboises, et surtout les muffins. Et alors là… une tuerie ! Les muffins nature sont plus jolis à l’œil, mais ceux à la framboise sont un vrai régal !!! Je pense que je vais tester avec d’autres fruits.
Mon petit truc, c’est que je ne mets pas de l’huile neutre, mais de l’huile d’olive très parfumée, et ça à l’air de plaire.
Je te souhaite une belle fin de semaine et j’espère lire une de tes nouvelles publications très vite. 🙂
Ah Nathalie, merci, et j’adore ton petit côté première de la classe pour la réalisation du gâteau (super efficace et motivée !)
J’en suis très heureuse !
Merci aussi de partager avec nous tes astuces. Tu me donnes bien envie d’essayer l’huile d’olive (que j’aime déjà beaucoup dans les cakes salés) et de venir un jour le goûter, préparé à ta façon, dans ta maison d’hôtes !
C’est de mémoire le 1er gâteau que j’ai dû apprendre à faire avec ma maman. Donc de jolis souvenirs à l’évocation de cette recette.
Après avoir pris le temps de vous lire, j’ai pris la sage décision de m’offrir une petite douceur. Verdict : un vrai Bonheur apprécié de tous les gourmands de la maison, un gâteau si moelleux qu’on ne culpabilise même pas d’en reprendre une petite tranche !!!!
Merci une nouvelle fois pour ce partage, pour vos mots. Déjà hâte de continuer ma lecture 🙂 Bon week end ***
C’est parfait s’il n’y avait pas de culpabilité mais des sourires !
Il en reste un peu pour le petit-déjeuner ?
Je suis vraiment touchée si les mots aussi font plaisir…
Bon week-end !
Récidive ce jour, je le déguste à l’instant avec un thé bien chaud (météo oblige), c’est un pur Bonheur comme bon nombre de vos (tes) recettes. Petite variante, j’ai mis un peu moins de farine de riz pour y ajouter un peu de farine de lin et dosage indique de fleur de mais.
Rien à envier à d’autres gâteaux, une base simple c’est toujours la réussite de faire plaisir !!!
Bon week-end Claire ***
Oui, osons le tutoiement !
Un bonheur qui vient jusqu’à moi… (Et me donne de plus en plus envie de tester cette farine de lin que je n’ai pas encore dans mes placards !) Merci beaucoup de me le faire partager.
C’est si gentil… que j’ai même un peu honte de « poster » si peu souvent.
A bientôt ! Bon dimanche !
Merci pour le « tu » !!! J’aurai partagé avec plaisir ma farine de lin mais la date limite optimale d’utilisation est trop juste (si j’empoisonne quelqu’un je préfère que ce soit moi ah ah ah). Je vois le producteur début juillet, je me ferai un plaisir de t’en envoyer un paquet. En attendant, il te reste celle du commerce mais honnêtement rien à voir avec cette poudre d’or … (et normande of course)
Ne t’excuse pas pour les posts, pas facile de tout concilier. Bon dimanche ***
J’adore découvrir de bons produits de nos régions !
Je ne sais pas si je peux me laisser gâter ainsi… Peut-être peut-on commander chez ce producteur ?
Nous en reparlons cet été, et en attendant je te souhaite beaucoup beaucoup de bons petits gâteaux à la « poudre d’or »…
🙂 Amicalement
Merci pour ce retour en enfance, tous ces petits riens qui ont fait de nous ce que nous sommes aujourd’hui et ce gâteau en fait partie ainsi que les livres de Michel Oliver La pâtisserie mais aussi la cuisine est un jeu d’enfant, livres qui ont été les déclencheurs d’une passion qui s’est concrétisée en devenant professionnelle Chef à domicile .Souvenirs…
Merci pour ce message. Votre histoire est très belle.
(J’adorais ces livres ! Je crois qu’ils ont fait une ré-édition ?)
Bonne continuation, Claire